
LA BELLE
Arcadie
En 1898, l’artiste polonais Jacek Malczewski s’inspire d’une figure mythique pour produire son œuvre la plus fameuse : Thanatos I. Si le thème paraît éculé, Malczewski parvient pourtant à s’affranchir des codes classiques pour livrer à son spectateur une œuvre toute en finesse et en étrangeté...
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En effet, dans la mythologie grecque, Thanatos est le fils de la Nuit et incarnation de la Mort. Mais ici, plutôt que de représenter un homme squelettique drappé de tissus comme c’est traditionnellement le cas, l’artiste peint une femme fière, plantureuse, quasi-nue et omniprésente, dont la posture évoque étrangement la noblesse des héroïnes antiques... Et pourtant, loin de toute grandeur, sa peau presque noire rappelle la couleur de la chair d’un corps en décomposition ; elle porte sur son dos d’imposantes ailes de métal, qui font écho à celles des sirènes et des harpies, créatures démoniaques, mais aussi aux ailes d’airain des oiseaux du lac Stymphale, en Grèce, qui utilisent leurs plumes pour mettre à mort les hommes.
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Derrière la fausse noblessse de cet ange de la mort, la représentation atypique du personnage est renforcée par l’impassabilité de son attitude : elle semble préparer calmement sa faux à l’arrivée du vieil homme qui surgit à l’arrière plan. S’apprête-t-il à rejoindre l’autre monde ? C’est ce que laisse penser la représentation du temple blanc, qui rappelle l’entrée des tombeaux dans certains cimetières, et semble symboliser ici la porte des Enfers...
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Thanatos I, Jacek Malczewski, 1898
Artwork analysis for Artips, 2015